Retour à l’histoire
Ceux qui me connaissent, même de loin, sont au courant de mon rapport disons conflictuel avec le milieu universitaire : ses jeux de pouvoir et de relations, la mesquinerie des hiérarchies, la condescendance envers le reste de la société (surtout pour la production de savoirs), la valorisation des egos plutôt que la recherche d’un débat véritablement allumé et démocratique, etc. Je pourrais continuer longtemps.
L’université, j’y suis quand même venu par une passion, celle de l’histoire, que j’avais déjà petit mais qui s’est vraiment affirmée grâce à mon premier professeur d’histoire, Claude Pageau, en secondaire II. J’ai découvert, à travers ses récits de voyage, le monde et, à travers ses cours, les cultures qui l’habitent. Plus tard, cette passion s’est perdue dans les dédales du Département et de mon propre parcours chaotique, jusqu’à devenir un peu amertume. J’ai décroché, puis raccroché.
J’ai même un temps pensé « relancer » ma carrière universitaire, j’avais un projet de doctorat, des professeurs qui m’appuyaient. J’ai été refusé, probablement l’une des meilleures choses qui me soient arrivées. C’est à ce moment que j’ai choisi de finir ma maîtrise selon mes propres termes, à commencer par mettre en œuvre un projet tangible découlant de mes travaux sur la fête nationale.
Plusieurs collaborations avaient foiré à cet égard, dont deux projets de documentaires. J’ai alors monté le site Le lys en fête, le lys en feu : une histoire de la fête nationale au Québec, en incluant des textes d’analyse et des entrevues que j’ai réalisées avec des professeurs (l’historien Gilles Laporte et le sociologue Jean-Philippe Warren) et des vieux de la vieille qui avaient connu le Québec des années 1960 (le cinéaste Jacques Godbout et le journaliste Claude Jean Devirieux).
Même si je n’ai jamais vraiment eu de reconnaissance pour ce site (du moins jusqu’à récemment), c’était important pour moi de faire en sorte que mes travaux aient un « output » plus tangible qu’un mémoire de plus sur le rayon de la bibliothèque de l’UQAM. C’était aussi une façon de rendre accessible à tous des informations souvent inédites sur un sujet qui touche tous les Québécois. J’ai redonné cette année un nouveau spin à ce site et je dois dire que je suis assez fier du résultat.
En fait, un phénomène plutôt inattendu s’est produit depuis que j’ai terminé mes études (et mis une croix définitive sur l’université) : j’ai recommencé, tranquillement, à aimer l’histoire. Seulement, pas la même qu’avant. Je me suis découvert une passion – et une proximité certaine – avec une histoire plus populaire, ancrée dans le quotidien et la culture vivante.
Dans le cadre de recherches personnelles sur les tavernes de Montréal, leur histoire et leur fonction sociale, je me suis retrouvé au service des archives du Centre d’histoire de Montréal et me suis rendu compte, à ce moment, à quel point j’aimais vraiment fouiller les archives pour reconstruire la vie d’autrefois. Et, comme je n’ai plus de normes départementales à satisfaire, je peux me permettre de le faire avec une plume autrement plus vivante que celle autorisée à l’université…
Plus tôt cette année, dans le cadre d’une proposition de services, j’ai écrit un article sur la tradition des hommes forts au Québec, un sujet qui m’intéressait depuis longtemps, mais que je n’avais jamais pris le temps de creuser. J’ai eu un plaisir fou à écrire cet article (dont j’ai écrit la suite tout récemment) et, même si je n’ai pas obtenu le contrat que je convoitais, je l’ai publié sur mon portfolio pour me rendre compte, quelques mois plus tard, que c’était de loin l’article le plus populaire de mon site (il m’attire jusqu’au quart des visites totales).
De fil en aiguille, et en me creusant l’entrepreneur (une autre découverte que la sortie de l’université m’a permis de faire), j’en suis arrivé à la conclusion qu’il pourrait m’être possible de développer un créneau historique à mon travail, quitte à en monétiser des produits dérivés : livres électroniques, conférences, ateliers et visites guidées… Les possibilités sont quasiment infinies et, quand on sait que les universitaires se cantonnent à leurs publications spécialisées et que l’histoire grand public est souvent faite par des journalistes ou des amateurs sans formation particulière, j’ai comme le pressentiment qu’il existe un terrain de jeu où j’aurai assez d’espace pour m’amuser. Du moins, je tenterai le coup, on verra bien!
Je vous invite évidemment à suivre les développements à cet égard, mais j’aimerais surtout que vous me disiez ce que vous en pensez et si vous avez des idées de sujets à développer. Pour l’instant, je continuerai de plancher sur la fête nationale, les tavernes, les hommes forts et aussi l’accent québécois (y compris les sacres). Je veux travailler à montrer la culture québécoise à des Québécois qui, trop souvent, se cherchent et se connaissent mal. Je crois que ce travail doit être collectif, que tout un chacun a quelque chose à dire, des histoires de familles, des morceaux de trésor cachés quelque part dans un grenier, une grange ou un sous-sol. Mettons ces morceaux en commun pour tisser la courtepointe de la culture québécoise.
Je vous redonne des nouvelles sous peu!